La modiste

 »-. La modiste avait trente-deux ans. Elle était rousse, ronde et très vive. On l’appelait La Belle Julia, parfois aussi la Veuve Joyeuse. Le dernier surnom la définit assez bien, elle était veuve, en effet, d’un vieux marchand de bois, Robichon, qui lui avait légué une petite fortune. Et elle avait beaucoup d’amants. On n’en voulait jamais à Julia de sa vie si légère. Elle ne s’attaquait jamais aux hommes mariés, elle ne criait pas sur les toits les noms de ses conquêtes, et elle confectionnait les plus beaux chapeaux de la ville, des copies parfaites de modèles de Reboux et Refern, qu’elle vendait dix fois moins cher qu’une modiste parisienne. Certaines clientes venaient de Tours pour lui passer commande.

Et pourtant ses origines étaient un peu douteuses, puisque le vieux Robichon l’avait découverte au Petit-Soleil, une maison close de Tours où il avait ses habitudes. Julia était la propre fille de la sous-maîtresse, elle officiait sous le nom de Zouzou- Mignon. Robichon devint assez vite son client le plus assidu, il remarqua que Julia était très douée de ses ✋. Lorsqu’elle n’avait pas de clients à cajoler, elle tuait le temps à confectionner des chapeaux, qu’elle ne portait jamais, puisqu’elle vivait cloîtrée. Robichon enterra sa vie de garçon au Petit-Soleil, puis revint très fièrement à Rouvray pour épouser sa rousse jeunesse devant le maire et le curé. » Irène Frain (Secret de famille)

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