La confession

 »-. Tu veux me confesser, tu y tiens, tu crois que c’est urgent ?-. C’est toujours urgent-. Mais, à ton avis, c’est moins urgent pour Félix, ou pour César ? -. Oui, c’est moins urgent. -. Bon, eh bien, confesse-moi. Attendez un peu, vous autres, Elzéar, est-ce que c’est obligatoire que je reste seul avec toi ? -. Non, Honoré, les premiers chrétiens se confessaient devant tout le monde, en public. Mais c’étaient des saints. -. Oui, ils n’avaient pas grand chose à dire… Eh bien moi, je ne suis pas un saint, mais je voudrais que vous restiez là. Parce que je vais te dire, Elzéar, quand on fait sortir tout le monde, je trouve que ça n’a pas bon air.

Ceux qui sortent, à peine ils sont dans l’escalier, ils commencent à se dire. -. Qu’est-ce qu’il doit lui raconter, là-haut ? Qu’est-ce qu’il a dû en faire dans sa vie, des cochonneries, des voleries, des mensonges !- Et on s’imagine des choses terribles. Eh bien moi, je n’ai rien de terrible à te dire. Je n’ai pas fait que des bonnes actions, loin de là, mais enfin, le mal que j’ai fait, ça m’ennuie plus de l’avoir fait que de le raconter devant tout le monde. Sauf peut-être devant Norine. Parce que je n’ai pas fait des crimes, mais il faudrait peut-être que je dise des choses qu’on ne dit pas devant les dames, quoique ça soit avec elles qu’on les fait. » Marcel Pagnol (César)