»-. Savez-vous que le mal existe ? Non, vous ne pouvez pas le savoir comme moi. Le jour où Maman est partie, j’étais encore bien jeune, je n’avais pas plus de douze ans, peut-être, mais j’ai compris. C’était un matin, elle m’avait envoyé faire une course, très loin, du côté de la Glacière, je me souviens. Quand je suis revenu, nous habitions au bas de la rue de la Seine, elle était avec un homme que j’avais vu souvent l’aborder dans la rue, les jours où papa n’était pas là. Un homme grand, fort, qui parlait rude.

En me voyant, elle s’arrêta de remplir une valise. -. Déjà là ?-. Tu t’en vas, Maman ? Mais qu’est-ce que vous faites ? Pourquoi est-ce que Maman s’en va ? Pourquoi est-ce qu’elle part avec vous ?-. Elle se tourna vers lui avec des yeux si brillants que je crus qu’elle allait le chasser tout de suite. Elle m’avait pris dans ses bras, m’embrassait en me disant des choses tendres. Et moi j’étais accroché à elle, je ne voulais pas la laisser partir. Je rabâchais au milieu de mes larmes. –. Chasse-le, maman, chasse-le !-. Mais, quand l’homme cria de nouveau quelque chose, elle me repoussa. Elle détacha mes ✋ qui la tenaient, et elle me dit en se relevant. -. Tu mangeras chez la concierge, aujourd’hui-. Puis elle sortit très vite pendant que, me roulant dans un coin de la pièce, je l’appelais en sanglotant. » Daniel-Rops (Mort, où est ta victoire ?)
Une triste hstoire. Beau portrait de bagages.
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