»-. Cette mordante soirée d’automne traîne un voile de brouillard, sournois comme des ✋ froides qui se glisseraient par les défauts de mes vêtements, et couleraient sur ma peau. Je ne puis en chasser les caresses, semblables à celles des filles qui, ayant un long temps fait le trottoir, veulent à toute force, une fois avec vous, réchauffer leurs doigts glacés sur votre corps de passage. La murette du quai me guide vers un pont. La brume en crue gonfle la Seine. Elle coule autant sous les arches que par-dessus. Demain, elle se dissipera, mais si j’osais prier, ce serait pour demander qu’elle persiste, tenace, et s’épaississe encore jusqu’à la fin des temps. Qu’elle réussisse à noyer jusqu’au dernier humain sous ses flots de découragement et de tristesse.

Les parapets des ponts, surnommés garde-fous, sont toujours bas et ne gardent personne, encore moins les déments. Si vos peines sont lourdes, elles pèsent à votre cou et vous entraînent vers l’eau engloutissante. M’arrêtant, je me penche. Monter, sauter, s’enfoncer et en finir, ce sont les quatre actes logiques qui s’imposent maintenant à moi. Ils imagent les quatre dernières marches qui peuvent me conduire à l’oubli de ma douleur. Bien sûr, ces pensées ne pouvaient être que celles de l’ange noir, le voici à côté de moi, attentif. » Claude Seignolle (Histoires vénéneuses)
Belle description des ponts et des sentimenst qu’ils inspirent. Portrait amusant.
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