»-. Il demeura immobile derrière son bureau. Kurlik ! Le vieux mot de l’argot de Smyrne, terme insultant que les marchands turcs et arméniens emploient pour désigner ceux qui se laissent gruger, tous ceux qui sont naïfs, crédules, confiants et, comme tels, méritent d’être exploités sans merci, retentit de tout son accent moqueur dans le silence de son cabinet. Kurlik ! Il avait été berné par un couple de Siciliens désargentés. Et il ne s’était trouvé personne parmi tous ceux qui se disaient ses amis pour lui révéler la supercherie.

Ils devaient bien rire derrière son dos, trop heureux de le voir tomber dans le panneau, de le voir en adoration devant l’oeuvre d’un faussaire, lui qui avait la réputation d’avoir l’oeil si sûr. Et qui ne transigeait jamais sur les questions d’authenticité… Le chef-d’œuvre de votre collection est un faux… En face de lui, une étude pour la Crucifixion de Tolède le nargua un instant de ses jaunes pâles et de ses verts profonds. Puis se brouilla, disparut, le laissa seul dans un monde méprisant et hostile qui ne l’avait jamais vraiment accepté, et ne voyait en lui qu’un parvenu qui avait trop l’habitude d’être exploité pour qu’on eût à se gêner avec lui… » Romain Gary (Le Faux)
One of the prettiest you’ve made 🔥🔥👏
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Une drôle d’histoire, beau tableau.
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