»-. Regarde-toi dans cette glace, arrange peu ta coiffure ! Je t’ai donné, tout à l’heure, un avertissement pour ton retard, maintenant je t’octroie tes huit jours. Tu partiras vendredi, essaie de te caser ailleurs. Je t’avais donné une chance inespérée de réussir, le jour où je t’ai retirée de ce dancing de Montparnasse pour t’offrir une place de grand mannequin. En vingt-quatre heures, tu as gravi un degré de l’échelle sociale, en ayant la chance de pouvoir toujours être bien habillée-. Chantal était sortie en claquant la porte.

Cet hôtel n’était plus un cadre digne d’elle, il lui fallait le luxe, le vrai, avec son appartement au Bois de Boulogne, sa femme de chambre, son cabriolet automobile, son collier de perles et son carnet de chèques lui permettant d’éblouir les autres femmes ou ses anciennes compagnes de misère. Même son prénom, Chantal, ne cadrait pas avec une vie mesquine. Elle s’était toujours demandé qui, à l’Assistance publique, l’avait affublée de ce prénom distingué ? Elle aurait pu, comme tant d’autres, s’appeler Marie, ou Madeleine, ou même Lulu, Mado, Ninette… Vraiment, pour une fois, la seule dans sa vie jusqu’à présent, elle avait eu de la chance dans le choix de ce prénom. Elle se voyait déjà avec une particule, un nom dans le genre de Chantal de Boislieu ou même Chantal d’Harfleur. Elle cherchait, au plafond, le nom qui lui conviendrait le mieux, qui sonnerait le mieux… » Guy des Cars (L’Impure)
Joli portrait.
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