Un jeune 🐈 nommé Karamaralzaman

 »-. Ce n’est qu’un jeune 🐈, fruit des amours et de la mésalliance de Moune, chatte persane bleue, avec n’importe quel rayé anonyme. Dieu sait si le rayé abonde, dans les jardins d’Auteuil ! Par les jours de printemps précoce, aux heures du jour où la terre, dégelée, fume sous le ☀️ et embaume, certains massifs, certaines plate-bandes ameublies qui attendent les semis et les repiquages, semblent jonchées de couleuvres. Les 🐈 seigneurs rayés, ivres d’encens végétal, tordent leurs reins, rampent sur le ventre, fouettent de la queue et râpent délicatement sur le sol leur joue droite, leur joue gauche, pour l’imprégner de l’odeur prometteuse de printemps. Ainsi une femme touche, de son doigt mouillé de parfum, ce coin secret, sous l’oreille.

Il n’est qu’un jeune 🐱, fils d’un de ces rayés. Il porte sur son pelage les raies de la race, les vieilles marques de l’ancêtre sauvage. Mais le sang de sa mère a jeté, sur ces rayures, un voile floconneux et bleuâtre de longs poils, impalpables comme une transparente gaze de Perse. Il sera donc beau, il est déjà ravissant, et nous essayons de le nommer Karamaralzaman. En vain, car la cuisinière et la femme de chambre, qui sont des personnes raisonnables, traduisent Karamaralzaman par Moumou.  » Colette (Les deux chattes)