»-. Le train avait du retard, Lucien et Louis étaient entrés dans une salle d’attente, une baraque profonde avec, au centre, un brasero éteint, et, sur le côté, une litière de paille où une vingtaine d’hommes étaient allongés. Les sacs, les fusils, les casques, tout était empilé pêle-mêle. Les hommes étaient tristes, ils rejoignaient le train de ravitaillement qui devait les débarquer le lendemain sur le front. Des quinquets à l’huile clignotaient dans cette salle à travers la fumée des pipes. Dehors, toutes les dix minutes, des trains de troupes passaient, retardant de plus en plus le train de voyageurs que les artilleurs espéraient prendre.

Des convois interminables de quarante fourgons et plus se succédaient. Sur des wagons plats, défilaient des canons, des cuisines roulantes, des fourgons régimentaires, des ambulances et aux portières des rares wagons apparaissaient des têtes embroussaillées. Tout cela remontait là-haut. Dans la salle d’attente, les hommes s’étaient endormis. Un officier de garde faisait l’appel des isolés. Réveil. À tâtons, les hommes ramassaient leurs équipements. Un fusil tombait. L’officier tenant un falot à la ✋, faisait l’appel et les hommes venaient se grouper par petits paquets. -. C’est l’heure-. Lui aussi allait monter dans ce train-là. Lucien, lui, revenait de l’hôpital, il rentrait chez lui en convalescence. L’officier avait pris la tête de la petite troupe et la conduisait vers une rame de wagons noirs qu’on allait rattacher tout à l’heure au train de ravitaillement. Tout cela était dans son souvenir comme une chose entrevue, comme les images d’un monde où tout se passe et où rien n’arrive. » Louis Guilloux (Le sang noir)
Joli petit train !
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