L’âme de l’infâme Poitout

 » ». J’arrivai au 🏰 par les bois, il était évidemment souhaitable que personne ne me vit. Je pensais trouver une 🏡 silencieuse, je fus surpris par un bruit de voix, un bruit confis, un murmure innombrable. Et par-dessus ce bruit mystérieux, un roulement de voiture, un roulement lent sur le gravier de l’allée, et le pas lourd d’un 🐎. Je reconnus la voiture des morts, avec le drap noir, précédée du curé, et d’un enfant de chœur qui portait la croix. Le notaire arrivait en même temps, c’est un homme gros, court, rouge de visage, il faisait effort pour ne pas être en retard. -. Monsieur Bruno ! Vous êtes venu pour l’enterrement ?-. Au hasard je répondis. -. Pour l’enterrement, oui-. C’est bien, ça, de votre part, Poitout n’avait pas été très correct avec Madame votre mère. Mais la mort efface tout-.

Poitout ! Ainsi c’est Poitout qui était mort. -. Comment est-il mort ?-. Oh, une mort idiote et bien digne de la façon dont il avait vécu. Vous savez que, depuis la guerre, il avait des boeufs. Il les avait gardés, il paraît qu’il y trouvait son avantage. Bref, jeudi, il rentrait des champs et, quand il est entré dans la ferme, les boeufs l’ont serré contre le mur et l’ont écrasé-. Eh bien, que Dieu ait son âme !-. Son âme ? Vous en avez de bonnes, vous. Qu’est-ce que vous oubliez que Dieu en fasse, de son âme ? Et d’abord, en avait-il une ?-. Ainsi, Dieu s’était chargé de la vengeance. Dieu qui seul a le droit de nous venger, disait l’aumônier. Je n’avais pas de sang sur les ✋, c’est vrai. En étais-je heureux ? Mon sentiment était assez complexe. D’une part, l’essentiel était que Poitout eût expié ses crimes. Mais d’autre part, j’avais comme un sentiment de frustration… » Abel Moreau (Règlements de comptes)