Un monde étrange, tout en couleurs

 »-. À mesure qu’on approchait du Lobi, se précisait l’inquiétude de ce monde étrange. Le ciel était toujours aussi lumineux, mais d’un violet sourd, chargé d’orage. Il s’affaissait et, très loin, sur les collines, on eût dit que les 🌲 écrasés le portaient à bout de branches. Cette brousse peureuse fuyait l’homme. Parfois, dans les grands nérés qui bordaient la route, on voyait se blottir entre les fourches des branches de petits négrillons. Ils étaient grimpés là, autant pour se cacher que pour prendre leur 🍯 aux abeilles dans ces ruches en osier tressé qu’on accroche aux 🌲 qu’elles aiment.

Après Garoua et Batié, la route en lacets montait au flanc du bois noir, pour atteindre le sommet du plateau de rocailles qui portait les cases. -. Tu verras, l’endroit est perché comme un nid de guetteurs au-dessus du monde-. Et c’était bien cela. Là-haut, la falaise portait une immense table de pierre. À perte de vue, les collines d’un vert de métal tournaient en cercle autour de cette muraille de rochers. Et ce donjon des aigles avait son chemin de ronde, ses pitons démantelés, dressés comme des tours d’angle, ses contreforts, ses créneaux et ses meurtrières découpés dans la pierre usée par les ☀️ et par les vents. En bas, des vallées bleues se creusaient, suivant le lit des marigots et des rivières. – Regarde, là, en face de nous, coule un petit ruisseau. On le nomme le Bambassou. Ce trait rouge ? C’est la route qui monte vers les coteaux de Tankon et qui coupe une grande tâche jaune, les champs de mil de Dankana. Plus loin, dans le bleu, la Volta…- » René Guillot (Marouana du Bambassou)