Je suis l’eau de la rivière

 »-. Je vous en demande pardon, mais je ne sais rien qui s’apparente plus à un pèlerin que la rivière. Les 🌊 défilent en un voyage sans fin. Depuis combien de temps l’eau a-t-elle pour tâche d’agir ainsi ? Seul dans sa vieille pirogue, Timba mesurait sa vie. À l’âge de douze ans, il était entré dans cette école où l’on apprend à tirer le 🐟 de l’eau. Depuis lors, au fil du courant, son ombre avait suivi pendant les trente dernières années les lois de l’habitant de la rivière. Et tout cela pourquoi ? La sécheresse avait épuisé la terre, les graines ne remplissaient pas leurs promesses. Des yeux pareils à ceux d’un 🐕. Timba répugnait à l’admettre, mais la vérité est que la faim rend les hommes semblables à des animaux.

Alors qu’il songeait à ses souffrances, Timba fit glisser lentement son embarcation. Il laissa la pagaie mordiller l’eau, tandis que la pirogue s’accrochait à l’immobilité. Mais il ne put arrêter le cours de ses pensées. -. Quelle vie ai-je vécu ? L’eau, l’eau et rien d’autre -. Par ses balancements d’avant en arrière, le ⛵ accroissant son anxiété. -. Un jour, je serai avalé par la rivière, et on me repêchera dans l’eau. Si seulement j’appartenais au ciel-. Et il sentit peser sur sa vie le fardeau de trente ans de fatigue. Il se souvint des mots que son père prononça pour lui enseigner le courage. -. Tu vois le chasseur, là-bas ? Il prépare son pieu au moment où il voit la gazelle. Mais le pêcheur ne peut pas voir le 🐟 dans la rivière. Le pêcheur croit à quelque chose qu’il ne peut pas voir -. » Mia Couto ( Les 🐦 de Dieu)