Ma vocation d’écrivain

 »-. À vrai dire, je n’ai jamais décidé de devenir écrivain. C’est arrivé comme cela. Ou, plus exactement, c’est venu lentement. Par à-coups, nourri par le désespoir. L’événement s’est produit lors de ma dernière année à Oxford, quand j’ai compris que les ambitions universitaires qui m’avaient conduit là étaient définitivement mortes. Quand je me suis rendu compte que, bientôt, j’allais me retrouver sans bagages dans un monde pour lequel je n’étais pas préparé. Au cours de cette dernière année, l’inquiétude me rendit malade.

Jusque là, je n’avais guère eu, ou si peu, la prétention de devenir écrivain. Je n’avais eu aucun contact avec les ambitieux cercles littéraires et les troupes de théâtre d’Oxford. Je ne faisais partie d’aucune revue ni d’aucun journal d’étudiants. Je n’avais fait aucun apprentissage véritable, je n’avais rien en commun avec les jeunes femmes et jeunes gens qui partaient pour Londres, pleins d optimisme, les yeux encore brillants après les adieux au 🍾 fêtés dans les cours d’une douzaine de collèges. Je me trouvais assis à mon bureau, à contempler une page de caractères chinois -je préparais une licence de chinois- qui dansaient, vides de sens, sur le papier fragile… Pour des raisons que je ne peux sonder, une phrase me vint à l’esprit. -. Les Lutchman habitaient dans une partie de la ville où les 🏡, hautes et étroites…- » Shiva Naipaul (Mon frère et moi)