»-. Après cette curieuse prise de contact, comme si elles voulaient me signifier qu’elles m’adoptaient, mes compagnes m’entrainèrent au hammam, une succession de pièces minuscules éclairées par des lentilles de verre fixées aux coupoles. Elles me délestèrent prestement de mes vêtements européens, elles les jetèrent dans le poêle sans hésitation. Tout usés et maculés qu’ils fussent, ils étaient tout ce que je possédais et qui pouvait me rappeler mon existence antérieure. Les voir brûler me fit venir les larmes aux yeux. Les baigneuses m’enseignèrent ensuite les différents rites du bain, dans une confusion de rires, d’appels, d’exclamations.

Je fus successivement soumise au bain de vapeur pour nettoyer la peau –je crus étouffer-, puis aux jets d’eau froide qui fouettent le corps, puis aux jets d’eau chaude pour activer la circulation. Et enfin au massage à l’huile parfumée. J’eus droit à une séance au hammam tous les jours, et je m’aperçus que j’y prenais goût. Les gens d’ici se préoccupent de la propreté de leur corps. Heureux contraste avec les mœurs françaises en matière d’hygiène ! En France, on ne se lavait que parcimonieusement et sans conviction, on étouffait les odeurs corporelles à grands flots de parfums et les lieux d’aisance étaient plutôt inexistants. Ici, je découvris l’eau courante, chaude et froide, les cabinets d’aisance en marbre, les chasses d’eau.


Les femmes, ici, se plâtrent le visage comme seules auraient osé le faire en France les péripatéticiennes que j’avais aperçues dans les jardins du Palais-Royal. J’étais plus sensible à la variété et au raffinement des parfums qui nous étaient fournis avec prodigalité. Essence de musc, de 🌹, de tubéreuse, de bois de santal, d’🍊 amère, de géranium, de jasmin, toutes fabriquées au Sérail même, dans les laboratoires de l’apothicaire impérial. J’étais vêtue à la turque, pantalons bouffants de soie unie retenus par une sorte de châle noué sur les reins, chemise de mousseline blanche brodée d’or sur laquelle nous enfilons le dualma, un casaquin de velours très ajusté, voile léger pour enserrer les cheveux ou toque ornementée, le talpoche, crânement posé. » Michel de Grèce (La 🌃 du Sérail)


Belle histoire, belle série de tableaux pour l’illustrer !
J’aimeAimé par 1 personne
Beautiful illustration
J’aimeAimé par 1 personne