Le carton aux aquarelles

 »-. Il ouvrit son carton à dessins. Elle s’assit à côté de lui par terre sur la pelouse, et il trouva charmants son naturel et sa simplicité. Il avait déjà peint un 🐦- tailleur en train de construire son nid, un tisserin brun soutaché de jaune, un pigeon blanc, 🐦 de bon augure, et une colombe, blanche aussi. Tous les ramiers des jardins de la Rani portaient sa couleur préférée. Il avait même fait le portrait du 🦉 blanc, favori de la Rani, qui habitait dans un manguier. À chaque aquarelle que lui présentait Roger, la Rani poussait des cris de joie, comme une enfant émerveillée, et commentait en mahrate. Roger ne maîtrisait pas cette langue, mais comprenait, à son ton, qu’elle admirait son travail.

-. Comment as-tu découvert ta vocation de peintre ?-. Roger expliqua qu’il avait pris ses premières leçons de dessin avec sa mère, qui avait un petit talent. Elle peignait les portraits des notables du voisinage, là -bas, au Pays de Galles. -. Puisque tu as du talent, pourquoi as-tu choisi la carrière d’homme de loi ?-. Roger répondit qu’il aimait le droit, et sa profession. Il ne révéla pas à la Rani que ses parents l’y avaient fortement poussé, car voir leur fils avocat représentait pour eux le sommet de l’ascension sociale vers laquelle ils avaient tendu tous leurs efforts.- . Un artiste comme toi, Sahib, ne peut se complaire dans la sèche dialectique de la loi. Tu es fait pour PEINDRE et non pour vivre dans les dossiers… Puis-je garder le portrait du 🦉 ?-. Tous ces dessins vous appartiennent, Altesse -. Elle le remercia, prit le carton sous son bras et partit rapidement, comme un enfant qui vient de recevoir un 🎁 convoité et qui court vers sa cachette pour le contempler. » Michel de Grèce (La femme sacrée)