»-. Nous partons Ă huit heures. Nous longeons des marais. Aux đČ, dont les racines sont noyĂ©es, pend une hideuse chevelure grise. C’est la mousse espagnole, un parasite qui s’attaque Ă un rameau, le dĂ©vore, Ă©touffe une Ă une les branches, se noue autour du tronc qui, Ă son tour, expire aprĂšs avoir dĂ©truit les feuilles, les branches, s’ĂȘtre nourri du tronc. Le parasite gagne le pin, le cyprĂšs, l’oranger voisin et le dĂ©nude. Des forĂȘts entiĂšres ne sont que des squelettes d’đČ aux formes hallucinantes, drapĂ©s dans ce rideau de limaille que le vent balance. On voit parfois un large Ă©tang aux eaux sombres oĂč s’enfoncent des đČ noirs. Des hĂ©rons longent leurs rives.

La GĂ©orgie est le pays des pacaniers. Comme les cigarettes en Virginie et le linge de coton dans les Carolines, on vend ici aux voyageurs des sacs de pacanes. La route est large et vide. Ă onze heures, nous franchissons la ligne de dĂ©marcation. De nouveau, nous roulons entre les marais piquĂ©s d’đČ morts, oĂč s’accroche la mousse espagnole. Un effort de reboisement commence Ă porter ses fruits. Je cherche en vain d’opulentes plantations d’agrumes, ou les taches Ă©clatantes des fleurs tropicales, bougainvillĂ©es, liane aurore, plumbagos, poinsettias, hibiscus. Sous le ciel gris, le pays s’Ă©tend, plat et triste. PrĂšs de Lakeland, nous dĂ©couvrons les premiĂšres plantations d’agrumes. Comme les orangeries du Maroc et du Liban me paraissaient plus belles ! Il commence Ă pleuvoir. Henri me laisse dans un motel et part vaquer Ă ses occupations. -. Pourquoi n’es-tu pas allĂ©e te promener ?-. Comme il n’y a pas de trottoirs, on risque sa vie Ă chaque pas…-. » AgnĂšs Chabrier (MĂ©moires d’un proche avenir)
Intéressant ! Jolis arbres !
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