»-. Mais cette envie de voyage, est-ce un désir d’ailleurs ?-. Un rien de déterminisme, sans doute, mais il y a les lectures aussi. Quand j’étais enfant, j’aimais Le Monde perdu de Conan Doyle, Nils Holgersson, puis, plus tard, Jacques Prévert, Raymond Desnos et Raymond Queneau. Alors, le voyage ? Je sais seulement qu’il naît de l’encre, et qu’il s’y achève. Il y a toujours un prétexte qui s’inscrit auparavant, qui nécessite que l’on sache pourquoi on va prendre un ✈️ ou un tortillard. C’est vrai, les écrivains nous aident à voir, ils nous prêtent leurs mots, nous montrent du doigt les choses qu’ils nomment.

-. Et les paysages ?-. Je n’y suis guère sensible. Ce que j’aime, n’importe où dans le monde, c’est le mélange du sordide et du lumineux, la manière dont on distille les ordures à Calcutta pour les transformer en alcool, tandis qu’au moment même où vous découvrez cela, un mendiant vous offre une leçon de métaphysique. Il n’y a qu’à observer, écrire, pour nommer enfin. Mais écouter, toujours écouter, pour noter, lire dans les mots la finesse du sens qu’ils recouvrent. Je suis sans cesse épaté par cette histoire des Mayas précolombiens, quand ils furent confrontés pour la première fois aux conquérants égarés dans la jungle. Les Espagnols disaient. – Où sommes -nous ?- Yucatan, Yucatan-, ce qui signifiait -. Nous ne comprenons pas-. C’est ainsi que les conquérants de Montejo appelèrent la péninsule qu’ils venaient de découvrir… Comment voulez-vous que les Mayas ne se méfient pas des mots que le Nouveau Monde allait construire en détruisant leurs cités, en les décimant ? – Nous ne comprenons pas…- » Jacques Meunier (J’ai connu un recteur des steppes et un ministre de l’intelligence)
Belle histoire d’un voyageur et beau tableau.
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