Une jeune fille en châle de soie

 »- . Après avoir aperçu la promeneuse, ce fut justement ce châle qui avait attiré l’attention de William. Une si belle parure ne pouvait faire partie que de l’héritage d’une bonne famille, et la femme à qui il appartenait n’avait pu s’en séparer volontairement pour le donner, par exemple, à une servante. D’ailleurs, la jeune fille marchait comme une dame. Elle n’allait pas à grandes enjambées paysannes assurées, son pied hésitait. Pourquoi était-elle seule dehors ? Ce détail frappa William, car la coutume voulait, à l’époque, que les jeunes filles de cette condition fussent toujours accompagnées par une domestique ou une parente. Son châle ivoire avait la couleur de la très vieille soie soigneusement conservée. Son teint d’un blanc laiteux, tirant un peu sur le jaune, le frappa aussi alors, rien du teint frais assez vif tant vanté des Écossaises. Seule la bouche, en forme de ❤️, était d’un rouge léger et naturel. Des yeux noirs, des cheveux noirs, lisses, simplement noués sous une capote à brides. Mais, William s’en était déjà convaincu, impossible que ce fût une servante…

Un coup de vent impertinent dévoila un instant des chevilles fines sous de bas de coton blanc, autour desquels s’entrecroisaient les lacets noirs de ses petites chaussures plates. L’esprit de William vagabonda plus haut, rêva jusqu’à la jarretière invisible. Des pensées inconvenantes pour un pasteur de l’église presbytérienne d’Écosse ! Il se hâta de les discipliner, en portant son attention sur les gants de la promeneuse. Des gants noirs bon marché qui serraient un modeste bouquet d’asters. William sut qu’il n’oublierait jamais la couleur des fleurs, bleu lavande, rose, bleu, blanc, pourpre. Une jeune fille au teint blanc laiteux et à la cheville bien tournée, portant un arc-en-ciel entre ses ✋, et sur les épaules un châle de soie à longues franges. » Paméla Hill (Le Pasteur)