»-. Dans un milieu bas, où l’ambition elle-même était sordide quand elle existait, Simone avait grandi à peu près seule et mis tant de temps à découvrir les dangers qui l’entouraient qu’elle avait même été jusqu’à se laisser fiancer au fils d’un confrère de son père. Comme si la perspective de devenir à son tour Madame la Notairesse, une bonne épouse bien fidèle et une bonne mère de famille, avait été la perspective même du bonheur ❤️. Cette erreur n’avait pas été de longue durée, l’angoisse même où l’avait plongée ces fiançailles lui avait été salutaire, et elle avait rompu le marché en attendant de rompre l’amarre. Elle savait bien ce que cela voulait dire quand ils parlaient devant elle du bonheur, et de tout ce que cette immonde hypocrisie recouvrait de morts, une fois sur deux assassinés.

Car ils savaient très bien assassiner, et ils n’avaient besoin pour cela ni du 🗡️, ni du poison. Leurs moyens étaient plus subtils. Elle ne serait pas victime. Depuis l’instant où elle avait pris cette résolution, elle n’avait cessé de réfléchir aux moyens qu’elle emploierait, tout en demeurant la petite provinciale, et en continuant d’aller à la messe. C’est ainsi que, pour Simone, l’hypocrisie était devenue un axiome primordial, en attendant de devenir une science. Quant à la prétendue liberté des jeunes filles depuis la guerre, quelle plaisanterie ! Ce n’était pas une raison, parce qu’elles couchaient plus facilement avec les hommes -et encore était-ce bien vrai -pour qu’on se mit à penser qu’elles étaient soudain devenues libres. La vie n’était pas que cela… » Louis Guilloux (Le sang noir)
Un personnage !
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