». Misha s’appelait en vérité Michel, Michel Buisson. Misha, c’était pour les clients, pour les 🌃 enflammées du cabaret russe. Mais, Charles Martel ayant défait les Arabes à Poitiers, sa ville natale, – on pouvait en cherchant bien, par le jeu des migrations barbares et des métissages inhérents, créditer Michel Buisson d’un semblant d’origine cosaque –, ainsi du moins l’assurait-il, entre deux vodkas. Il habitait Strasbourg depuis un an. Renié par son père, un psychiatre borné fanatique du rang social, jugeant taré ce fils de trente ans que ne définissait aucun métier précis, Michel avait un jour laissé tomber famille, études et projets parisiens pour se lancer, avec un ami russe, un vrai celui-là, dans l’animation de La Troïka. Sa mère lui écrivait chaque semaine, en le suppliant de rentrer à Paris. Et, malgré l’amour filial, il repoussait chaque semaine à d’autres calendes la décision de mettre un terme à son escapade alsacienne.

Strasbourg, après tout, c’était la belle vie, son père lui fichait la paix. Le dimanche, il jouait au 🎾, l’hiver il faisait du 🎿. Le pinot noir abondait toute l’année, l’argent tombait régulièrement, les femmes défilaient dans son lit, Michel n’avait d’ailleurs qu’à se mettre au 🎹 pour susciter les pâmoisons. Daniel, son associé, une espèce de Viking aux yeux verts, levait plutôt les garçons. Dans la journée, Michel prenait des cours d’harmonie, ne désespérant pas d’être un jour un grand compositeur, assez fameux pour revaloir à son père le mépris dont ce dernier taxait les musiciens. » Yann Queffelec (La femme sous horizon)
Une belle histoire de liberté !
J’aimeAimé par 1 personne