Fantastiquement vôtre

 »-. Le fantastique est la seule littérature essentielle de l’âge de décadence ou de transition où nous sommes parvenus. Nous devons même reconnaître en cela un bienfait spontané de notre organisation. Car si l’esprit humain ne se complaisait encore dans de vives et brillantes chimères, quand il a touché à nu toutes les repoussantes réalités du monde, cette époque de désabusement serait en proie au plus violent désespoir. Et la société offrirait la révélation effrayante d’un besoin unanime de dissolution ou de suicide -. C’est Charles Nodier qui publia ces lignes, en décembre 1830. Le bon Nodier ne craignait pas de se montrer agressif, il haïssait les régimes politiques, les institutions, les mœurs. Mais il savait leur opposer sa foi en Dieu, en l’homme, en la littérature, et un optimisme profond qui fut sa bonté.

En 1883, Guy de Maupassant voit approcher la fin de la littérature fantastique, conséquence du changement de regard que l’homme jette sur l’univers. -. Il semble que la Création ait pris un autre aspect, une autre figure, une autre signification qu’autrefois-. C’est une création sans Dieu, livrée aux forces hostiles qui oeuvrent dans son sein. Désormais, seul le pessimisme saura être profond. -. Oui, vive la science, vive le génie humain ! Gloire au travail de cette petite bête pensante qui lève un à un les voiles de la création. Eh bien, malgré moi, malgré mon vouloir et la joie de cette émancipation, tous ces voiles levés m’attristent. On a supprimé l’invisible. Et tout me paraît muet, vide, abandonné -. » Antonia Fonyi