»-. Monseigneur changea de vêtements et se mit à réciter ses prières du soir. Il récitait attentivement ces vieilles prières se bien connues et, tout en les récitant, il pensait à sa mère. Elle avait eu neuf enfants, et près de quarante petits-enfants. Autrefois elle vivait avec son défunt mari, un diacre, dans un pauvre village, qu’elle habita très longtemps, de dix-sept à soixante ans. Monseigneur se souvenait d’elle à partir de sa plus petite enfance, à partir de trois ans environ, et combien il l’aimait ! Chère, inoubliable enfance ! Pourquoi ces années à jamais révolues lui apparaissaient -elles plus claires, plus chatoyantes et plus riches qu’elles n’avaient été réalité ? Quand, dans son enfance ou son adolescence, il était malade, combien tendre et attentive avait été sa mère ! Et maintenant, ses prières se confondaient avec ses souvenirs, qui flambaient en lui comme une flamme de plus en plus vive, et prier ne l’empêchait pas de penser à sa mère.

Le mal dont il souffre l’emporte en quelques jours. Il meurt la veille de Pâques. Un mois plus tard, un nouvel évêque est nommé, et personne ne parle plus de monseigneur Pierre. Très vite, il est totalement oublié. Seule, la vieille femme, sa mère, qui vit maintenant chez son gendre le diacre, dans une petite ville de province perdue, quand elle va le soir au-devant de sa 🐄 et rencontre dans le pré d’autres femmes, leur parle de ses enfants, de ses petits-enfants, et du fils qu’elle a perdu, un évêque. Et c’est vrai qu’on ne la croit pas toujours. » Anton Tchekhov ( L’Évêque)
Une belle histoire, joli tableau
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