Tôt le matin, Par ma fenêtre

 »-. Il est maintenant six heures du matin, la famille dort. Le silence est extraordinaire, seuls les 🐦 pépient, et quelque chose gratte derrière la tenture. J’écris ces lignes devant la grande fenêtre carrée de ma chambre. J’écris et jette des coups d’œil dehors. Devant mes yeux, s’étend un paysage extraordinairement doux, caressant. Une petite rivière, au loin la forêt, le village… Quand nous sommes arrivés à la datcha, il était déjà une heure du matin, les portes de la 🏡 n’étaient pas fermées… Sans réveiller nos hôtes, nous sommes entrés, avons allumé la lampe et avons trouvé quelque chose qui dépassait tout ce que nous attendions, des chambres immenses, plus de meubles qu’il n’en faut. Tout est extrêmement gentil, confortable et commode.

Une fois installé, j’ai rangé mes valises, et me suis assis pour manger un morceau. J’ai bu un peu de vodka, un peu de vin, et, tu sais, je me sentais tout joyeux en regardant par la fenêtre les 🌲 qui s’assombrissaient, la rivière… J’écoutais le rossignol chanter et n’en croyais pas mes oreilles, il me semblait être encore à Moscou. Il y faisait doux et calme. Ça sentait le réséda, le tabac et l’héliotrope, qui n’avaient pas encore fini de fleurir le long des massifs. Les intervalles entre les buissons et les troncs des 🌲 étaient remplis d’un brouillard peu épais, tendre, tout imprégné de 🌙… Des lambeaux de brouillard, pareils à des 👻, doucement, mais d’une manière perceptible à l’oeil, glissaient… L’univers entier n’était, semble-t-il, composé que de silhouettes noires et d’errantes ombres blanches.

La nature y est étonnante. Notre propriété est située sur le bord escarpé d’une petite rivière, près d’un endroit où l’eau tourbillonne jour et 🌃. Representez-vous un vieux jardin spacieux, des parterres de 🌸, des ruches, un potager, en contrebas la rivière avec sa saulaie touffue, qui, après une abondante rosée, devient un peu mate, comme grisonnante. De l’autre côté de la rivière, un pré, et, par-delà ce pré, sur la colline, se dresse la forêt de pins, effrayante, sombre. Dans cette forêt, les 🍄 naissent en masse , et, dans ses fourrés, vivent des élans. » Anton Tchekhov (Ariadna)