»-. J’ai vingt-quatre ans, mon chéri. J’ai eu un mari, un enfant, des amants en pagaille et plus de tristesse, en fin de compte, que de plaisirs et de bonheur. Est-ce que ma vie est finie ? Oncle Winston m’a conseillé d’être moins égoïste. Il prétend que je ne pense qu’à moi. J’ai essayé de lui faire comprendre que nous avions appliqué, en famille, la fameuse théorie de la division du travail, et que nous avions soigneusement partagé les tâches entre nous. Atalanta, avec Geoffrey, avait choisi les traditions, sa grandeur, ses rigueurs. Vanessa, avec Rudi, la contradictoire sentimentale et la provocation. Moi, c’était le vertige et tous les chagrins du plaisir. Il a froncé les sourcils.

-. Et personne, chez vous, n’a pensé à la générosité, au service des autres, à une forme, quelle qu’elle soit, de la conviction ou de l’idéal ?-. Oh si. Oncle Winston ! C’était le lot de Jessica. C’était son affaire à elle. Vous vous rappelez, elle pleurait souvent parce qu’elle pensait aux 🐈 qui recevaient des pierres, aux 🐦 poursuivis par les 🐱, aux pauvres écrasés par les riches, aux vaincus, aux infirmes. À tous ceux qui souffrent. Elle aimait les autres plus qu’elle-même-. Ce n’est pas de chance, elle est morte-. Elle est morte. Oncle Winston. Vous savez bien, ce sont les moins bonnes qui restent-. Oncle Winston a bougonné. Il a tiré sur son cigare. Il a murmuré quelque chose d’indistinct. – Tu sais que j’aimais Jessica, c’était la quatrième. La petite. La dernière-. » Jean d’Ormesson (Le bonheur à San Miniato)
Good one!
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Beau portrait !
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