Représailles pygmées

 »-. L’attaque s’est produite avant le lever du jour, alors que tout le monde était endormi, à l’exception de lui, l’ancêtre, qui ne se reposait jamais la 🌃 et qui se promenait autour des cases pour tromper son insomnie. C’est aussi une manière de veiller sur le sommeil de ses descendants. Mais la ruée des Pygmées avait été si subite qu’il n’avait pas pu donner un cri d’alarme, et avait dû lui-même de réfugier à l’extérieur du village en s’allongeant derrière un remblai de terre où les assaillants n’avaient pas deviné sa présence. C’était ce qui l’avait sauvé. Il pensait que quelques habitants de Manjo avaient peut-être réussi à s’enfuir, mais il n’en n’était pas certain. Connaissant la cruauté des Pygmées, il y avait tout lieu de craindre que tous les dormeurs eussent été massacrés dans les cases.

Accompagné par lui, j’allais de case en case, où les visions d’horreur furent hallucinantes. Le vieillard ne s’était pas trompé, les corps mutilés étaient déjà à demi calcinés par l’incendie. Tous avaient été tués, hommes, femmes, enfants, à l’exception du bébé. Devant l’une des cases, dont les débris prouvaient qu’elle avait dû être sensiblement plus importante que les autres, le vieil homme se baissa sur le sol pour ramasser une poignée de terre, qu’il répandit sur sa tête. -. C’était la demeure de mon fils, le Grand Kadiou, qui était le chef du village. Il m’avait succédé à cet honneur depuis que je m’étais senti trop âgé. Voyez, tous sont morts, sauf Yero, le plus jeune..- » Guy des Cars (Sang d’Afrique)