Un thé au Hoggar

 »-. Nous buvions souvent le thé avec tous ceux que nous croisions sur la route. La piste, à l’époque, était bordée de gros bidons de ferraille. Chaque véhicule semblait l’élargir désespérément pour échapper aux ornières. Nous n’avions pas de GPS, notre voiture n’était pas un 4X4, et pourtant nous allions presque partout, juste équipés de pelles pour se désensabler. La plus grande traversée nous conduisit d’Adrar, à l’ouest, à Aïn Salah et à Tamanrasset. J’ai beau interroger ma mémoire, elle faillit. Juste, je revois ce couple de Touaregs, ils tenaient tous deux un vélo. Elle avait des yeux qui auraient cloué à terre n’importe quel regard. La regarder, c’était comme prendre conscience de ma petitesse, de ma laideur d’homme blanc trop nourri, trop policé. Elle, avec le trait du klôl autour de ses 👁️, voilà qui en faisait la princesse absolue. De celle qu’on ne pourra plus oublier.

Quand nous buvions le thé, l’eau chauffait dans de petites bouilloires métalliques émaillées, j’avais vu qu’elles venaient de Pologne… Et souvent, ceux qui nous invitaient préféreraient aromatiser le thé avec une plante, une sorte d’armoise me semble-t-il, qu’avec la menthe. Ils cassaient le 🍞 de sucre avec un 🔨qui n’était autre qu’une vieille soupape. Dans le désert du Hoggar, nous avions campé près d’un cirque de pierre. C’étaient des tours noires qui ressemblaient aux pièces d’un échiquier géant. Consciencieusement, il m’arrivait de grimper sur ces blocs, face aux 🗻 taillées comme des orgues. Plus loin, j’ai découvert l’eau du désert, une guelta, des familles s’étaient installées près de ces piscines vertes. Des femmes m’avaient vendu une outre en peau de 🐐 noire. Ce fut une belle occasion de rire… » Christophe Raylat (L’esprit voyage)