État de couple

 »-. J’ai reçu la lettre de ton père -. Il m’en a parlé après l’avoir envoyée, je lui ai dit que ce n’était pas son problème, mais le mien. Je lui ai expliqué que ton départ m’avait causé un choc, c’est vrai. Mais qu’il m’avait également soulagée d’un poids. Tu as eu le courage de faire ce que moi je n’osais pas faire, de peur des conventions -. Voilà qui a le mérite d’être franc-. Nous savons fort bien à quoi nous en tenir. Nous avions chacun notre vie de notre côté, et ce n’était sûrement pas la meilleure des solutions -. Tu comptes demander le divorce ?-. C’est déjà fait. Je me suis mariée trop jeune, Maurice. Je n’imaginais pas ce qu’était une vie de couple. Je vais prendre le temps de tirer la leçon de ce que nous avons vécu -.

Je suis impressionné -. Tu n’as pas été un mauvais mari. Bien au contraire. Seulement, nous n’étions pas faits l’un pour l’autre. Je réalise aujourd’hui que je t’ai reproché pendant sept ans ta nouvelle orientation littéraire, sans jamais chercher à la comprendre vraiment. J’étais beaucoup trop influencée par mon père. Si je replongeais, aujourd’hui, dans une nouvelle relation, il y a gros à parier que je commettrais les mêmes erreurs. Je dois commencer par couper le cordon ombilical-. Je suis heureux que tu prennes les choses ainsi, Solange. J’aurais dû t’appeler plus tôt -. Nous nous serions sans doute balancé des horreurs à la tête. Et cela m’aurait, sans doute, empêchée de parcourir le chemin que ton silence m’a permis d’emprunter. Ne regrettons rien. Est-ce que tu es heureux, Maurice ?- » Paul Couturiau (L’inconnue de Saïgon)