»-. Aussi soudainement qu’avait éclaté la sauvagerie du printemps, s’établit la quiétude des jours paisibles. On les sentit tout de suite durs et solides, comme bâtis de ciment et de fer. La forêt était couverte de feuilles. Elle tenait deux fois plus de large qu’avant. Avant, elle n’était qu’un grillage de bois noir contre le ciel, maintenant elle était grasse et gonflée. Ce coin de ciel était bouché. Le plus petit 🌲, avant, mince charpente de fil de fer noir et luisant de pluie, maintenant engraissé et charnu, était devenu un habitant du monde. Il tenait de la place, il y avait moins de vide dans le ciel. On le voyait bien en regardant, mais on le sentait mieux encore en criant ou en faisant grand bruit. Avant, le bruit sonnait dans le vide. Maintenant, il sonnait dans la foule et dans la vie.

Les jours étaient dorés. Jacquou avait envie de viandes et de sang. Une hallucination vivante née de ses désirs l’entourait. Il voyait d’admirables bêtes aux formes transparentes, qui passaient devant lui comme de la fumée. Il avait maintenant une grande ambition, il voulait avoir les bêtes de ses rêves, les élever, les faire marcher sur sa terre, les mettre là, sur ce plateau de Grémone où il n’y avait plus rien à faire, où maintenant il y avait quelque chose à créer. Il voyait devant lui un long et beau travail à quoi employer ses ✋ et son corps. À partir de ces jours-là, la saison fut lourde et paisible. Les hommes et les femmes étaient remplis de désirs, mais personne n’osait encore réaliser les grands rêves. C’était la tristesse de printemps. » Jean Giono (Que ma joie demeure)
Bel arbre 🏞
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