»-. Je veux que vous me disiez si, avec le temps, je peux espĂ©rer devenir un pianiste de premier ordre -. Non, pas mĂȘme en mille ans. Si je sentais en vous l’Ă©toffe d’un artiste, je n’hĂ©siterais pas Ă vous conseiller de tout abandonner pour l’art. Il n’y a que l’art. AuprĂšs de l’art, fortune, rang, pouvoir pĂšsent moins qu’un fĂ©tu. Ăvidemment, vous avez beaucoup travaillĂ©, ne croyez pas que ce soit du temps perdu. Vous aurez toujours du plaisir Ă jouer, mais regardez vos â, ce ne sont pas des â de pianiste. Vous ne savez pas vous Ă©couter, vous ne pouvez pas espĂ©rer devenir plus qu’un excellent amateur. Or, en art, un abĂźme sĂ©pare l’amateur du professionnel-. George ne repondit pas. Seule sa pĂąleur laissait deviner qu’il assistait Ă l’Ă©croulement de tous ses espoirs. Un silence affreux pesait.

-. Voulez-vous que je joue pour vous ? -. Oui, je vous en prie-. Elle s’assit au đč et ĂŽta les bagues dont ses doigts Ă©taient chargĂ©s. Elle joua du Bach. Je ne sais pas le titre des morceaux, mais je reconnus le cĂ©rĂ©monial guindĂ© des petites cours allemandes francisĂ©es, la prospĂ©ritĂ© satisfaite des bourgeois Ă©conomes, les danses villageoises sur le gazon, les đČ sombres qui ressemblaient Ă des arbres de NoĂ«l, et le lever du âïž sur la vaste campagne allemande. L’odeur chaude de l’humus flottait, une sĂšve vigoureuse semblait monter des profondeurs de la terre. Ce jeu diaphane et lumineux faisait penser Ă la đ Ă©panouie dans un crĂ©puscule d’Ă©tĂ©. George eut un petit rire. -. Cela tranche la question -. » Somerset Maugham (Amours singuliĂšres)
Well composed.
JâaimeJâaime
Joli portrait d’un pianiste pour illustrer cette histoire un peu triste đ
JâaimeJâaime
Vive la fĂȘte ! đ”đ
JâaimeJâaime