Au paradis d’Adam et Ève

 »-. Mais pourquoi Dieu, guide assuré des navires chrétiens, avait-il mené les Espagnols, sous la conduite d’un Génois, jusqu’à ces rivages miraculeux ? Dans quel dessein, clair ou caché ? Le paradis ? Mais, dans ce cas, qui sont ces habitants ? Des petits cousins d’Adam et Ève, restés jusqu’ici inconnus ? Les premières affabulations se dissipèrent vite. À cataloguer dans l’espèce humaine ? Le premier soldat qui sauta sur une femme et l’engrossa en fit la rapide démonstration. Et même, ils souriaient. La 🌃, ils fermaient les yeux et dormaient. Ils ne pouvaient pas respirer dans l’eau, comme l’expérience le démontra, ni regarder en face le ☀️. Ils criaient fort quand on leur faisait mal. Fatigués, ils se reposaient.

Des hommes et des femmes. Mais de quel type ? Relevant de quelle catégorie ? La lointaine pensée d’Aristote domine encore la raison. Même si parfois la nature se trompe, il est clair que, lors de la création et de l’expansion de l’espèce humaine, plusieurs étages ont été prévus. Par exemple, les uns sont des civilisés et les autres sont des barbares. Les uns sont nés pour commander, les autres pour obéir. À vrai dire, on ne fut pas long à déclarer que les peuples nouveaux avaient pour vocation l’obéissance. D’apparence fruste, sans écriture, sans architecture visible, sans religion articulée, ils étaient des esclaves-nés, de vrais esclaves de nature. Aussi commença-t-il à les rassembler, les embrigader, à les mettre rudement au travail, à les enchaîner pour leur enlever toute tentative d’évasion, à les frapper et même à les tuer. » Jean-Claude Carrière (La controverse de Valladolid)