Virtuellement musée

 »-. Dans son musée virtuel, un artiste jouissait d’un privilège évident, un peintre français du dix-neuvième siècle, Jean-François Millet. Rembrandt (pas le vrai, c’est un pseudonyme ) avait accroché seize de ses oeuvres. Il y avait là Les porteuses de fagots, Les Botteleurs, Le tonnelier, Le Repas des Moissonneurs, Deux Glaneuses, L’ Été les glaneuses, Le Greffeur, Le Sommeil de l’enfant, Les glaneuses, L’ Angélus, La Mort et le bûcheron, Bergère assise tricotant, La Leçon de tricot et La Famille du paysan. Intrigué, Calvin (pas le vrai, c’est aussi un pseudonyme) avait voulu connaître la raison de ce choix. Il leur trouvait en effet un indéniable air de famille.

-. N’est-ce pas, vous avez remarqué ? L’ensemble de sa production de 1849 jusqu’à sa mort décline ce thème… Une véritable obsession !-. C’est flagrant ! Ce leitmotiv de la botte, de la gerbe, du fagot… Cette compulsion à montrer des sujets assemblant, liant, nouant, cousant, greffant, cerclant, priant ! La condition paysanne offrait pourtant maintes autres activités à dépeindre. Au moins autant de situations où l’homme défait, coupe, fend, brise, sépare, divise… Il ne nous montre pas ses moissonneurs fauchant les épis, mais assemblant des meules. Son bûcheron ne coupe pas les branches,il les réunit. Pourquoi ce parti pris?-. Stimulé par la curiosité de son jeune émule, Rembrandt s’était alors lancé dans une longue démonstration, d’où il résultait que ces oeuvres constituaient, peut-être, la réaction du peintre aux convulsions de son temps. Comme s’il avait voulu opposer le souvenir de ces scènes de son enfance à un présent chaotique qu’il déplorait… » Jean-Michel Truong (Le successeur de pierres)