»-. Peut-être est-ce l’effet du vendredi Saint -. Agnès sursauta. Elle était seule, ou presque, dans l’église. Les musiciens s’étaient retirés. Le public s’en était allé. Elle ne s’était aperçu de rien. Derrière elle se tenait. Hanno, l’air songeur, il s’assit sur une chaise de la rangée précédente. -. Depuis des années, je rêve de donner l’une des Passions le Vendredi Saint. J’aimerais jouer l’Oratorio de Pâques le dimanche pascal, et celui de Noël le 25 décembre. Je pourrais décider les musiciens. Mais cette idée indigne curés et pasteurs. Pas question de laisser la musique remplacer les rites. Pourtant, je suis sur que, si on l’écoutait, les églises seraient à nouveau remplies les jours de fête. Ne souffre-t-on pas davantage avec le Christ grâce à Bach, qu’en entendant un vieux curé psalmodier des prières et célébrer des rites auxquels il ne croit plus lui-même ? La 🎶 ne ment pas.

Vous souvenez-vous de l’Aria de Joseph d’Arimathie, du gentil Joseph d’Arimathie, dans la Passion selon Saint Mathieu ?-. Sans oser se retourner pour ne pas rompre le charme et interrompre Hanno qui parlait enfin 🎶🎶, Agnès récita les paroles à mi-voix. -. Je veux enterrer Jésus moi-même-. Elle l’entendit les chantonner d’une jolie voix de baryton. -. Bach écrivait ses œuvres pour des occasions déterminées. Le sacré et le musical se confondaient. Aujourd’hui, on joue ses cantates et ses oratorios n’importe quand. Et, dans les églises, l’on chante des chants stupides. On perd chaque fois un peu plus de sens. Cette 🌃 est la plus terrible de toutes. À cette heure, demain, le Christ sera mort et enterré. Dans la tombe de Joseph d’Arimathie. Cette 🌃, il est à la veille de son agonie. Nul ne sait ni le jour ni l’heure. Mais lui le savait -. » Isabelle Hausser (La Table des enfants)